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Un homme de 39 ans vient en consultation pour douleurs articulaires asymétriques et gonflement des doigts; un diagnostic d’arthrite réactive a été posé. Les douleurs sont localisées à droite, main, coude et hanche et sont plus importantes la nuit , entre minuit et 1h du matin. Il utilise un produit Ayurvédique en spray (Reli) pour soulager les douleurs qui viennent à peu près une fois par semaine et qu’il anticipe, utilisant le spray à l’avance. S’appuyer sur le côté droit le fait souffrir, il doit donc supporter son poids lorsqu’il passe de la position assise à la position debout. Manger des aliments aigres, particulièrement des mangues vertes, augmente la douleur. Il a aussi une légère tendance à bégayer, surtout lorsqu’il rencontre des gens pour la première fois. 

Dr: Parlez-moi de votre douleur plus précisément

Pt: Les douleurs ont commencé quand j’avais 16 ans, dans le bout des doigts. Le moindre contact aggravait la douleur et mes doigts devenaient rouges. Maintenant, la douleur est très sévère; c’est comme si j’avais un abcès à l’intérieur et je ne peux pas plier mon bras. C’est comme si j’avais été battu avec un objet émoussé, comme si j’avais du sang caillé à l’intérieur. C’est pire quand je laisse mon bras pendre et au toucher. C’est mieux quand je secoue la main. Quand ça a commencé, la douleur me faisait pleurer et je me demandais ce qui allait m’arriver plus tard. Maintenant, j’arrive à tolérer la douleur mais demain je n’en suis pas sûr. Si j’en parle à ma femme, elle va s’inquiéter. Je sais que ça va empirer, alors je n’en parle pas. Je peux ne pas me plaindre; si quelqu’un me poignardait, je ne dirai même pas « aie ! » (il pleure). Je sens que ça va continuer, c’est en dehors de mon contrôle, alors je supporte.

floodLa première fois que j’ai senti cette douleur, je dormais et je rêvais: il y avait une inondation, j’étais dans un bateau et je voyais beaucoup de gens se noyer, emportés par la force du courant. Je me voyais en train d’essayer de sauver ces gens. J’étais sur le côté droit du bateau et je sauvais quelqu’un, puis j’allais sur le côté gauche et sauvais quelqu’un d’autre. Je me voyais faire ça encore et encore et avec chaque mouvement la douleur dans ma main empirait. C’était comme si ma main était cassée; comme si elle était congelée. Je pouvais à peine bouger mon bras mais je me forçais à continuer, bien que je puisse à peine m’en  servir. La partie la plus horrible du rêve était la douleur, je ne pouvais me concentrer sur rien d’autre; elle était sans limite, intolérable et j’en pleurais. Pendant ce temps, je m’expliquais à moi-même que cette douleur était là et bien là, qu’elle serait là pour toujours et qu’il valait mieux que je me concentre sur les gens qui se noyaient et essayer de sauver leur vie, plutôt que sur la douleur. »

Il est essentiel de comprendre le psychisme du patient car bien que son problème soit un problème d’arthrite, sa manière de le gérer est aussi sa maladie; il pense qu’il n’y a aucun espoir, que la douleur sera toujours là et que la seule manière de gérer la situation est de supporter la douleur. La douleur, comme la situation dans laquelle il se trouve dans son rêve, est intolérable; une situation extrêmement exigeante, dans laquelle un effort surhumain est demandé et à laquelle il semble faire face. Nous pouvons observer sa sensibilité à la douleur et le fait qu’il essaie de la contrôler pour pouvoir sauver des vies. Cette manière de gérer une situation indique le miasme cancéreux; une situation incontrôlable, à la limite du supportable, extrêmement ardue, qui demande un effort surhumain, ce qui est exactement la situation dans son rêve.

Dr: Y a-t-il un autre événement dans votre vie qui vous a beaucoup marqué?

Pt: Oui, je me rappelle qu’une fois ma fille était très stressée par ses examens et on l’avait retrouvée inconsciente sur son lit, les yeux grand ouverts et les jambes raides. Cela m’a occasionné un choc; elle était là, souffrante et je ne pouvais rien faire. Je ne pouvais pas le supporter. C’était si inattendu, si soudain, de voir quelqu’un que j’aime souffrir comme ça. Une autre fois, je me promenais avec ma mère, tenant sa main, et elle fit un faux-pas et tomba. J’étais choqué, j’étais là avec elle et elle était quand même tombée! Je m’en voulais d’être aussi impuissant car dans cette situation, je n’avais rien pu faire. Je deviens sentimental et pleure facilement, spécialement quand il s’agit de ma famille.

Dr: Autre chose?

Pt: Je me suis blessé à la tête et une autre fois, je me suis coupé, la plaie était béante, la chair à vif, mais j’ai réussi à contrôler la douleur qui était intolérable et je n’ai pas pleuré.

Dr: En général, comment êtes-vous?

Pt: J’aime écouter de la musique, des chansons mélodieuses, tristes, pas du genre marrantes. Souvent, j’éteins la lumière, je m’allonge sur mon lit et j’écoute de la musique; alors, je me sens en paix. Tout est nouveau, comme au paradis. J’oublie tout et je suis tranquille, même si j’ai mal. Je bégaye depuis que je suis petit, particulièrement lorsque je rencontre des gens. Je n’aime pas les confrontations, je les évite mais je peux être de mauvaise humeur, même si je ne le dis pas.

Analyse: papaver field

D’un côté, nous pouvons voir une sensibilité aux douleurs intenses et à la souffrance. D’un autre côté, nous voyons paix, calme, silence et absence de douleur. Le problème ici est la sensibilité à une sensation: la douleur intolérable. Nous ne voyons aucune trace de structure, de maintien, ou de manque, traits qui sont typiques du règne minéral. Il n’y a non plus aucune indication de la dynamique victime/agresseur qui domine le règne animal. Nous sommes complètement dans le règne végétal; le fait qu’il soit sensible et pleure facilement confirme le règne végétal. Sa sensibilité à la douleur indique la famille des Papaveraceae. Qui plus est, dans cette famille, Opium se situe dans le miasme cancéreux: le besoin de contrôler l’insupportable douleur, d’éviter la souffrance en s’anesthésiant. Un état qui ressemble à celui de la méditation et que l’on peut comparer à celui que le patient décrit lorsqu’il écoute de la musique dans le noir: calme, tranquille, en paix.

Prescription: Opium 1M, une dose.

Suivi:

Dans les mois qui suivirent, la douleur disparut presque entièrement, après avoir eu quelques épisodes douloureux. Il se réveille plus frais et devient plus confiant en un avenir sans douleur. Sa colère, dont il n’avait pratiquement pas parlé car il essayait de la contrôler, s’estompe et il commence à avoir envie d’être plus sociable et à aider les autres. Son bégaiement diminue et quand cela lui arrive, il n’est plus aussi affecté. Sa condition s’améliora jusqu’au point de ne plus avoir besoin de prendre d’antalgiques, la douleur finit par disparaître complètement et il se dit heureux.  

Photos: Wikimedia Commons
Deichbruch an der Elbe 1825; Friedrich Thöming (1802-1873)
Papaver somniferum; Mohnblumenfeld in Frankreich Aufgenommen im Sommer 2003 von Wolfgang Horlacher   

Opium: un cas d'arthrite réactive

Un homme de 39 ans vient en consultation pour douleurs articulaires asymétriques et gonflement des doigts; un diagnostic d’arthrite réactive a été posé. Les douleurs sont localisées à droite, main, coude et hanche et sont plus importantes la nuit , entre minuit et 1h du matin. Il utilise un produit Ayurvédique en spray (Reli) pour soulager les douleurs qui viennent à peu près une fois par semaine et qu’il anticipe, utilisant le spray à l’avance. S’appuyer sur le côté droit le fait souffrir, il doit donc supporter son poids lorsqu’il passe de la position assise à la position debout. Manger des aliments aigres, particulièrement des mangues vertes, augmente la douleur. Il a aussi une légère tendance à bégayer, surtout lorsqu’il rencontre des gens pour la première fois. 

Dr: Parlez-moi de votre douleur plus précisément

Pt: Les douleurs ont commencé quand j’avais 16 ans, dans le bout des doigts. Le moindre contact aggravait la douleur et mes doigts devenaient rouges. Maintenant, la douleur est très sévère; c’est comme si j’avais un abcès à l’intérieur et je ne peux pas plier mon bras. C’est comme si j’avais été battu avec un objet émoussé, comme si j’avais du sang caillé à l’intérieur. C’est pire quand je laisse mon bras pendre et au toucher. C’est mieux quand je secoue la main. Quand ça a commencé, la douleur me faisait pleurer et je me demandais ce qui allait m’arriver plus tard. Maintenant, j’arrive à tolérer la douleur mais demain je n’en suis pas sûr. Si j’en parle à ma femme, elle va s’inquiéter. Je sais que ça va empirer, alors je n’en parle pas. Je peux ne pas me plaindre; si quelqu’un me poignardait, je ne dirai même pas « aie ! » (il pleure). Je sens que ça va continuer, c’est en dehors de mon contrôle, alors je supporte.

floodLa première fois que j’ai senti cette douleur, je dormais et je rêvais: il y avait une inondation, j’étais dans un bateau et je voyais beaucoup de gens se noyer, emportés par la force du courant. Je me voyais en train d’essayer de sauver ces gens. J’étais sur le côté droit du bateau et je sauvais quelqu’un, puis j’allais sur le côté gauche et sauvais quelqu’un d’autre. Je me voyais faire ça encore et encore et avec chaque mouvement la douleur dans ma main empirait. C’était comme si ma main était cassée; comme si elle était congelée. Je pouvais à peine bouger mon bras mais je me forçais à continuer, bien que je puisse à peine m’en  servir. La partie la plus horrible du rêve était la douleur, je ne pouvais me concentrer sur rien d’autre; elle était sans limite, intolérable et j’en pleurais. Pendant ce temps, je m’expliquais à moi-même que cette douleur était là et bien là, qu’elle serait là pour toujours et qu’il valait mieux que je me concentre sur les gens qui se noyaient et essayer de sauver leur vie, plutôt que sur la douleur. »

Il est essentiel de comprendre le psychisme du patient car bien que son problème soit un problème d’arthrite, sa manière de le gérer est aussi sa maladie; il pense qu’il n’y a aucun espoir, que la douleur sera toujours là et que la seule manière de gérer la situation est de supporter la douleur. La douleur, comme la situation dans laquelle il se trouve dans son rêve, est intolérable; une situation extrêmement exigeante, dans laquelle un effort surhumain est demandé et à laquelle il semble faire face. Nous pouvons observer sa sensibilité à la douleur et le fait qu’il essaie de la contrôler pour pouvoir sauver des vies. Cette manière de gérer une situation indique le miasme cancéreux; une situation incontrôlable, à la limite du supportable, extrêmement ardue, qui demande un effort surhumain, ce qui est exactement la situation dans son rêve.

Dr: Y a-t-il un autre événement dans votre vie qui vous a beaucoup marqué?

Pt: Oui, je me rappelle qu’une fois ma fille était très stressée par ses examens et on l’avait retrouvée inconsciente sur son lit, les yeux grand ouverts et les jambes raides. Cela m’a occasionné un choc; elle était là, souffrante et je ne pouvais rien faire. Je ne pouvais pas le supporter. C’était si inattendu, si soudain, de voir quelqu’un que j’aime souffrir comme ça. Une autre fois, je me promenais avec ma mère, tenant sa main, et elle fit un faux-pas et tomba. J’étais choqué, j’étais là avec elle et elle était quand même tombée! Je m’en voulais d’être aussi impuissant car dans cette situation, je n’avais rien pu faire. Je deviens sentimental et pleure facilement, spécialement quand il s’agit de ma famille.

Dr: Autre chose?

Pt: Je me suis blessé à la tête et une autre fois, je me suis coupé, la plaie était béante, la chair à vif, mais j’ai réussi à contrôler la douleur qui était intolérable et je n’ai pas pleuré.

Dr: En général, comment êtes-vous?

Pt: J’aime écouter de la musique, des chansons mélodieuses, tristes, pas du genre marrantes. Souvent, j’éteins la lumière, je m’allonge sur mon lit et j’écoute de la musique; alors, je me sens en paix. Tout est nouveau, comme au paradis. J’oublie tout et je suis tranquille, même si j’ai mal. Je bégaye depuis que je suis petit, particulièrement lorsque je rencontre des gens. Je n’aime pas les confrontations, je les évite mais je peux être de mauvaise humeur, même si je ne le dis pas.

Analyse: papaver field

D’un côté, nous pouvons voir une sensibilité aux douleurs intenses et à la souffrance. D’un autre côté, nous voyons paix, calme, silence et absence de douleur. Le problème ici est la sensibilité à une sensation: la douleur intolérable. Nous ne voyons aucune trace de structure, de maintien, ou de manque, traits qui sont typiques du règne minéral. Il n’y a non plus aucune indication de la dynamique victime/agresseur qui domine le règne animal. Nous sommes complètement dans le règne végétal; le fait qu’il soit sensible et pleure facilement confirme le règne végétal. Sa sensibilité à la douleur indique la famille des Papaveraceae. Qui plus est, dans cette famille, Opium se situe dans le miasme cancéreux: le besoin de contrôler l’insupportable douleur, d’éviter la souffrance en s’anesthésiant. Un état qui ressemble à celui de la méditation et que l’on peut comparer à celui que le patient décrit lorsqu’il écoute de la musique dans le noir: calme, tranquille, en paix.

Prescription: Opium 1M, une dose.

Suivi:

Dans les mois qui suivirent, la douleur disparut presque entièrement, après avoir eu quelques épisodes douloureux. Il se réveille plus frais et devient plus confiant en un avenir sans douleur. Sa colère, dont il n’avait pratiquement pas parlé car il essayait de la contrôler, s’estompe et il commence à avoir envie d’être plus sociable et à aider les autres. Son bégaiement diminue et quand cela lui arrive, il n’est plus aussi affecté. Sa condition s’améliora jusqu’au point de ne plus avoir besoin de prendre d’antalgiques, la douleur finit par disparaître complètement et il se dit heureux.  

Photos: Wikimedia Commons
Deichbruch an der Elbe 1825; Friedrich Thöming (1802-1873)
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